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Les Institutions supérieures de contrôle (ISC) sont des agences gouvernementales essentielles qui vérifient si l’argent public est utilisé efficacement et légalement, et qui évaluent si les données financières produites par les gouvernements sont complètes et fiables. Même si ces institutions sont indispensables pour le bon fonctionnement d’un système budgétaire, la majorité des citoyens ont une compréhension limitée de leurs rôles et de leurs fonctions.
Depuis 2006, l’Enquête sur le budget ouvert (EBO) a cherché à mesurer le rôle et l’efficacité des institutions supérieures de contrôle et leur contribution à des budgets plus responsables. Dans ce blog, nous nous penchons sur les forces et les faiblesses des institutions de contrôle sur la base des données sur dernier cycle de l’Enquête.
La situation de l’audit public : Résultats de l’Enquête sur le budget ouvert 2015
L’EBO 2015 a révélé de sérieuses lacunes sur la manière dont les ISC fonctionnement et signalent leurs résultats dans de nombreux pays. Par exemple, un grand nombre d’ISC ne sont pas indépendantes du pouvoir exécutif – les premières cibles de leurs contrôles. Ce problème est particulièrement répandu au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MOAN) et en Afrique subsaharienne, où le responsable de l’ISC dans de nombreux pays peut simplement être démis de ses fonctions sans l’approbation de l’Assemblée législative ou des tribunaux (voir la Figure 1).

L’Enquête 2015 a également révélé un manque de transparence dans les conclusions des audits. Dans plus d’un tiers des pays étudiés (35 sur 102), les rapports d’audit sont soit publiés trop tard pour avoir un impact ou ne sont pas mis à la disposition du public. Les pays de la région MOAN et d’Afrique subsaharienne enregistrent à nouveau les plus faibles performances : huit des 10 pays de la région MOAN et 15 des 27 pays d’Afrique subsaharienne n’ont pas publié de rapport d’audit dans les 18 mois suivant la fin de l’année budgétaire.
Dans près de la moitié des pays étudiés (49 pays), les assemblées législatives n’ont pas tenu d’audiences publiques pour examiner les rapports d’audit. Et plus de la moitié des pays (55 pays) n’ont pas publié de rapport sur les actions de suivi préconisées par les rapports d’audit. Cela signifie que, dans un grand nombre de pays, le public ignore aussi bien les résultats de l’audit que les actions menées par le gouvernement pour y répondre.
Tout commence avec la publication du rapport d’audit
Les résultats de l’EBO 2015 révèlent qu’il existe une relation importante entre la mise à disposition au public des rapports d’audits et les autres mesures visant à améliorer la transparence et la responsabilité du système d’audit. Certes, les données indiquent les pays qui publient des rapports d’audit sont deux fois plus susceptibles d’organiser des audiences publiques sur les conclusions de l’audit et près de six fois plus susceptibles de publier des rapports sur les mesures correctives prises par l’exécutif (voir la Figure 2). C’est pourquoi il est important pour les pays qui ne publient pas de rapport d’audit de faire ce premier pas vers le renforcement du système de reddition de comptes.

Les assemblées législatives comblent-elles les lacunes ?
Les résultats de l’EBO 2015 indiquent que dans de nombreux pays, les ISC n’ont pas utilisé leur potentiel d’être le protecteur efficace des deniers publics. Tandis que les faiblesses des ISC sont un facteur limitant important, les facteurs externes peuvent souvent jouer un rôle tout aussi important dans la réduction des impacts des audits. Par exemple, la majorité des ISC ne peuvent pas utiliser leurs résultats pour sanctionner directement les gouvernements ou contraindre les dirigeants à prendre des mesures. Au lieu de cela, elles soumettent généralement leurs rapports d’audit aux assemblées législatives, qui sont ensuite responsables de l’utilisation de ces rapports pour demander aux dirigeants à rendre des comptes.
L’une des mesures que nous souhaitons à ajouter à l’EBO est une évaluation de la façon dont les assemblées législatives utilisent les rapports d’audit et comment elles collaborent avec les ISC au cours de ce processus. En attendant, les évaluations réalisées par le programme PEFA « Public Expenditure and Financial Accountability » peuvent nous aider à mieux comprendre cette question. Les rapports PEFA sont disponibles pour 59 pays évalués dans l’EBO 2015. Ces rapports révèlent que les assemblées législatives ne contrôlent pas de manière efficace les rapports d’audit qui leur sont soumis. Les principales conclusions sont les suivantes :
- L’examen par l’Assemblée législative est réalisé après des retards importants. Dans 47 des 59 pays, les rapports d’audit sont présentés aux assemblées législatives dans les 12 mois suivant la fin de l’année budgétaire concernée. Mais dans presque la moitié de ces 59 pays, soit les rapports d’audit ne sont jamais examinés par les assemblées législatives, soit les examens prennent plus de 12 mois. Les retards dans l’examen législatif sont plus fréquents dans les pays d’Asie du Sud (quatre pays sur cinq) et en Amérique latine et dans les Caraïbes (six pays sur neuf) que dans les pays d’Afrique subsaharienne (13 sur 22 pays).
- Le contrôle législatif est faible. Dans 47 des 59 pays, les législatures n’ont pas tenu d’audiences détaillées avec les fonctionnaires responsables dans la majorité, voire toutes, les entités auditées qui avaient reçu un avis défavorable. Dans plus d’un tiers de ces 59 pays, les assemblées législatives n’ont pas émis de recommandations sur les mesures qui devaient être mises en œuvre par l’exécutif. La région d’Amérique latine et des Caraïbes est la région qui enregistre les performances les plus faibles, sachant que sur les neuf pays évalués, six affichent des performances médiocres.
- L’exécutif ignore les recommandations du corps législatif. Parce que les rapports d’audit – quand ils sont publiés – reçoivent généralement peu d’attention du public ou des médias, les gouvernements sont souvent confrontés à peu de pression pour les prendre au sérieux. De puissants dirigeants peuvent saper les efforts de responsabilisation de l’assemblée législative en décidant simplement d’ignorer les recommandations de l’audit. Dans la grande majorité des pays (55 sur 59), rien ne prouvait que l’exécutif ait mis en œuvre les recommandations de l’audit aux assemblées législatives.
Marche à suivre
En fin de compte, un indicateur important d’un système d’audit en bon fonctionnement est qu’il doit produire des conclusions qui se traduiront pas des changements positifs. Ensemble, l’EBO et le PEFA notent les trois façons dont la responsabilité de l’exécutif concernant les conclusions des audits des ISC peut être améliorée dans les différentes régions :
- Les ISC doivent être des institutions juridiquement indépendantes. Ceci est particulièrement vrai pour les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord et d’Afrique subsaharienne.
- Les organes législatifs nationaux doivent tenir des audiences exhaustives en temps opportun sur les résultats de l’audit et émettre des recommandations sur les actions correctives à mettre en œuvre par les fonctionnaires responsables des entités auditées. Il est essentiel que les assemblées législatives en Asie du Sud, en Amérique latine et dans les Caraïbes apportent des changements pour renforcer leur contrôle des conclusions des audits.
- Le public et les médias doivent avoir accès aux rapports d’audit en temps opportun et aux discussions qu’ils suscitent dans les Assemblées législatives. Ce problème concerne particulièrement les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord et les pays d’Afrique subsaharienne. Il faut également fournir au public des preuves sur les mesures correctives prises en réponse aux conclusions de l’audit, ce qui manque actuellement dans presque tous les pays.